Audition au Sénat – Partage du Dr Marc Legeais au Réseau Simago

Cher réseau Simago,
Ce mois de mai il nous a été donné l’opportunité avec Charles-Henry Béglin (cofondateur du Réseau Simago) et moi-même de représenter le Réseau Simago au cours d’une audition du Sénat dans le cadre de sa mission d’information relative à la « financiarisation » du système de santé. Nous avons donc été auditionnés par les rapporteurs de la commission des affaires sociales, Madame la Sénatrice Corinne Imbert, Messieurs les Sénateurs Olivier Henno et Bernard Jomier.
Quatre acteurs ont été identifiés par les sénateurs :
- un acteur historiquement construit autour d’une offre de téléradiologie – France Imagerie Territoire
- un acteur hybride oscillant entre modèle collaboratif et « capital » – Vidi
- le groupe IMDEV
- et donc le Réseau Simago
Notre audition par la Mission d’Information nous a offert l’occasion de répondre à nombre de questions posées par les rapporteurs.
Lors de son propos liminaire Charles-Henry Béglin a pu recontextualiser le phénomène de regroupement à l’œuvre dans le secteur de la radiologie mais plus généralement dans celui de la santé. Ces regroupements déjà initiés par la précédente génération de radiologues nous ayant précédé se justifient notamment par la difficulté de gérer des plateaux techniques complexes, d’une organisation médicale par surspécialité, d’une nécessaire mutualisation des achats, des fonctions supports et d’une intégration collective des innovation technologies (IA) et organisationnelles (téléradiologie). Ce phénomène s’est amplifié avec l’effet ciseaux dans lequel nous place tant l’augmentation des coûts (inflation, revalorisation salariale pour suivre le SEGUR de la santé, coûts supplémentaires non ou peu financés : produits de contraste, téléradiologie, IA…) que la stagnation des cotations. La progression de « la financiarisation » est ainsi directement liée à la dynamique de mutualisation et de regroupement au niveau régional et national.
Le regroupement implique le rapprochement capitalistique de structures. En imagerie médicale, ces structures organisées en SEL détiennent directement ou indirectement des équipements radiologiques (IRM, scanner, tables de radiographie, mammographes, échographes, etc), des systèmes informatiques et travaillent avec des équipes médicales et paramédicales importantes. Dès lors, ces structures ont des valeurs importantes et ce rapprochement implique des transactions plus conséquentes difficilement finançables par le seul recours au crédit traditionnel pour financer l’achat d’une table de radiologie ou d’un mammographe.
C’est la raison pour laquelle le Réseau Simago a choisi de s’associer à son partenaire minoritaire (20% du capital) le groupe français ARDIAN en plus de ses prêteurs. Nous ne pensons pas qu’un financement uniquement soutenu par de la dette bancaire soit un marqueur de plus grande liberté et de moindre responsabilité. Rappelons-nous le slogan « un crédit vous engage et doit être remboursé… ». Notre partenaire de financement est en parfaite adéquation avec les intérêts du réseau et des médecins investisseurs (qui détiennent > 50% du capital), et à ce titre, associé aux bonnes comme aux mauvaises nouvelles. Il apporte également le capital supplémentaire nécessaire pour nouer les associations clés et investir dans les plans technologiques stratégiques.
Le réseau Simago a également un rôle à jouer pour favoriser la transition générationnelle. Les jeunes générations de radiologues rejoignent essentiellement de très gros groupes car ils sont peu intéressés par les vicissitudes d’une petite structure. Il n’en demeure pas moins que ces centres d’imagerie – quasi « PME » (4 à 15 radiologues) constituent la colonne vertébrale de la radiologie française et maillent notre territoire. Chez Simago, c’est environ 7 heures de temps de gestion par médecin que nos équipes centrales (une cinquantaine de salariés) prennent à leur charge afin de leur faire gagner du temps médical et du temps de répit. Ainsi, nous diminuons le caractère chronophage des charges administratives et managériales des petites structures de radiologies pour rendre ces organisations plus attractives aux jeunes médecins, et en conséquence, pérenniser le maillage territorial de l’imagerie médicale. Nous proposons aux jeunes radiologues de s’associer directement dans la holding, en achetant le montant de parts de leurs choix. Nous pouvons également les accompagner dans la mise en place d’un emprunt bancaire pour ceux qui souhaitent acheter davantage de titres et au-delà de ce que leur patrimoine leur permet.
Dans un contexte de correction naturelle rapide d’un prix de parts historiquement très bas en radiologie, au regard des sous-jacents économiques, les organisations en réseau comme Simago favorisent donc la participation capitalistique des jeunes médecins et évitent les pièges d’association à une part ou en prêt de parts. Par ailleurs, les jeunes médecins bénéficient d’un accès individuel et volontaire à la plateforme de Téléradiologie ATI offrant la télé interprétation d’une vingtaine de groupes hospitaliers partenaires et des centres Simago. La conséquence : une attractivité qui ne se dément pas, 21 médecins radiologues se sont associés dans les SELAS du réseau Simago en 2023.
Concernant la question des montages et la nécessité de nouvelles règles prudentielles évoquées par les Rapporteurs, nous avons souligné la nature des règles de publicité et de transparence qui accompagnent déjà toute structuration financière. La complexité qu’inspirent les montages juridiques découle davantage de la taille des acteurs. In fine, de nouvelles règles prudentielles ne nous paraissent pas nécessaires.
La détention de titres dans les SEL est particulièrement réglementée et limitée en France. Les droits de vote et le capital sont limités à 25% par un tiers non-médecin, le tiers non-médecin ne peut pas prendre part au vote pour l’agrément ou l’exclusion d’un associé professionnel exerçant, les mandataires sociaux de SELARL ou SELAS (gérant, président et directeurs généraux) ne peuvent être que des médecins. Avec uniquement 25% de droits de vote, le tiers non exerçant ne peut imposer son point de vue sur aucun des sujets. Il ne peut être qu’une des voix à la discussion mais les médecins sont prépondérants dans la décision finale. Ces restrictions ne sont pas présentes chez nos voisins européens et à l’inverse, la qualité des soins n’est pas dégradée, pour l’imagerie médicale en Allemagne, en Italie ou en Espagne. Par ailleurs les instances ordinales ont déjà le pouvoir de veiller à l’application du cadre réglementaire tel qu’il est défini par les textes et décrets en vigueur sans interprétation possible et veillant à la stricte équité de l’exercice en tout point du territoire, la CPAM contrôle les encaissements et les ARS renouvellent ou non les autorisations d’EML à date en pouvant également les conditionner à des objectifs intercalaires à travers les CPOM. Il nous apparait dès lors que le secteur de l’imagerie médicale est déjà suffisamment régulé en France.
Il nous semble que l’enjeu soit davantage celui de la qualité et du service rendu au patient. Beaucoup d’acteurs méconnaissant ce processus de regroupement s’interrogent sur la qualité d’accueil et de diagnostic des patients.
Rappelons que les SEL du Réseau Simago ont accueilli 13 000 patientes supplémentaires en 2023 pour leurs mammographies alors que dans le même temps le nombre de mammographies diminuent en France : Simago met ainsi son réseau au service de le prévention et du dépistage précoce, notamment celui du cancer du sein. Nous travaillons actuellement sur une proposition de charte de bonnes pratiques qui devra être observée par les groupes d’imagerie médicale. Au demeurant, pour le patient français, il serait intéressant que cette charte s’applique tant pour les réseaux d’imagerie avec un partenaire financier, que les groupes sans partenaire financier et peut être également aux acteurs hospitaliers.
Nous n’avons pas manqué de relever de la part d’organisations auditionnées par la Mission des injonctions qui pourraient se résumer à : Réguler, Contrôler, Interdire, Radier. Nous espérons avoir convaincu que notre projet peut se résumer à Innover, Intégrer, Financer, Regrouper c’est ce que porte le réseau Simago et ses 260 radiologues exerçants.
Dr Marc Legeais – Médecin Radiologue – Groupe IRSA à La Rochelle – associé du Réseau Simago